Colonne des citations

 Nous présentons ici une sélection, non-exhaustive, de nos citations de référence:

   Tout ce qui me remonte démonte mes concurrents, tout ce qui les remonte me démonte. Dans une société où la place des individus n’est pas déterminée à l’avance et où les hiérarchies sont effacées, les hommes sont toujours occupés à se fabriquer un destin, à « s’imposer » aux autres, à se « distinguer » du troupeau, c’est-à-dire à « faire carrière. 

GIRARD (René), Des choses cachées depuis la fondation du monde, Paris, Le Livre de poche, coll. « Biblio essais », 2006, avec J.-M. Oughourlian & G. Lefort, p. 408.

  

Il faut que chacun se dirige librement vers les marchandises que le bon système de production capitaliste fabrique pour lui. « Librement » car, forcé, il résisterait. La contrainte permanente à consommer doit être constamment accompagnée d’un discours de liberté, fausse liberté bien sûr, entendue comme permettant de faire « tout ce qu’on veut.

Dany-Robert Dufour, Vivre en troupeau en se pensant libres, in Le Monde diplômatique, Paris, janvier 2008

 

Le capitalisme n’est rien d’autre que cela : la séparation des gens de leur propre action. 

J. Holloway, Changer le monde sans prendre le pouvoir.

  

Never doubt that a small group of thoughtful, committed citizens can change the world. Indeed, it is the only thing that ever has. (trad. : « Ne doutez jamais qu’un petit groupe de citoyens réfléchis et engagés peuvent changer le monde. En effet, c’est la seule chose qui a toujours été.) 

Margaret Mead

 

L’argent est le bien suprême, donc son possesseur est bon […]. Je n’ai pas d’esprit, mais l’argent est l’esprit réel de toute chose. […] Il est la divinité visible, la transformation de toutes les qualités humaines et naturelles en leur contraire, la confusion et la perversion universelle des choses […]. Il est la courtisane universelle, l’entremetteur universel des hommes et des peuples. 

K. MARX (Karl), Manucrits de 1844, in Marx ou l’utopie communiste, Paris, Flammarion, coll. « Le Monde de la philosophie », 2008, trad. J.-P. Gougeon, p. 192.

  

Aujourd’hui, l’utopie a changé de camp : est utopiste celui qui croit que tout peut continuer comme avant.

Pablo Servigne

  

Bouddha, l’Eveillé, dit : l’illusion est constitutive de la condition humaine.

  

C’est en cherchant l’impossible que l’homme a toujours réalisé et reconnu le possible, et ceux qui se sont sagement limités à ce qui leur paraissait le possible n’ont jamais avancé d’un seul pas.

M.Bakounine, L’Empire knouto-germanique

« Nul ne saurait ignorer que l’un des facteurs essentiels du problème social en France, comme dans presque tous les pays du monde, se trouve dans ce complexe d’infériorité que crée chez le travailleur le sentiment de son insécurité, l’incertitude du lendemain qui pèse sur tous ceux qui vivent de leur travail. Le problème qui se pose aujourd’hui aux hommes qui veulent apporter une solution durable au problème social est de faire disparaître cette insécurité. Il est de garantir à tous les éléments de la population qu’en toute circonstance ils jouiront de revenus suffisants pour assurer leur subsistance familiale. C’est ainsi seulement, en libérant les travailleurs de l’obsession permanente de la misère, qu’on permettra à tous les hommes et à toutes les femmes de développer pleinement leurs possibilités, leur personnalité, dans toute la mesure compatible avec le régime social en vigueur. Voilà qui suffit à démontrer l’ampleur du contenu de la notion de sécurité sociale. Celle-ci implique d’abord une organisation économique qui fournisse à tous les hommes et à toutes les femmes en état de travailler une activité rémunératrice. (…) Il faut, en second lieu, que l’activité ainsi garantie à tous les hommes et à toutes les femmes leur apporte les ressources suffisantes pour satisfaire à leurs besoins personnels et pour couvrir leurs charges familiales. »

Ambroise Croizat, discours du 8 août 1946 à propos de la sécurité sociale

  

Supposons que nous produisions comme des êtres humains, chacun de nous s’affirmerait doublement, dans sa production, soi-même et l’autre. 1. Dans ma production, je réaliserais mon individualité, ma particularité ; j’éprouverais en travaillant, la jouissance d’une manifestation individuelle de ma vie, et, dans la contemplation de l’objet, j’aurais la joie individuelle de reconnaître ma personnalité comme une puissance réelle, concrètement saisissable et échappant à tout doute. 2. Dans ta jouissance ou ton emploi de mon produit, j’aurais la joie spirituelle immédiate de satisfaire par mon travail un besoin humain, de réaliser la nature humaine et de fournir au besoin d’un autre l’objet de sa nécessité. 3. J’aurais conscience de servir de médiateur entre toi et le genre humain, d’être reconnu et ressenti par toi comme un complément à ton propre être et comme une partie nécessaire de toi-même , d’être accepté dans ton esprit comme dans ton amour. 4. J’aurais, dans mes manifestations individuelles, la joie de créer la manifestation de ta vie, c’est à dire de réaliser et d’affirmer dans mon activité individuelle ma vraie nature, la socialité humaine. Nos productions seraient comme autant de miroirs où nos êtres rayonneraient l’un vers l’autre. 

K. Marx

  

J’ai appris une chose et je sais en mourant qu’elle vaut pour chacun : Vos bons sentiments, que signifient-ils si rien n’en parait dehors ? Et votre savoir, qu’en est-il s’il reste sans conséquences ? (…) Je vous dis : Souciez-vous, en quittant ce monde, non d’avoir été bon, cela ne suffit pas, mais de quitter un monde bon !

Bertolt Brecht, Sainte Jeanne des abattoirs, 1930

  

Il est facile d’accuser les dirigeants de tous ces mouvements de les avoir trahis. Le fait qu’il y ait eu tant de trahisons suggère pourtant que l’échec des gouvernements radicaux, socialistes ou communistes a des racines plus profondes. La raison qui interdit de se servir de l’État pour mener à bien un changement radical dans la société tient à ce que l’État est lui-même une forme de rapport social qui s’inscrit dans la totalité des rapports sociaux capitalistes. L’existence même de l’État en tant qu’instance séparée de la société signifie que, au-delà du contenu de sa politique, il participe activement au processus qui sépare les gens du contrôle de leur propre vie. Le capitalisme n’est rien d’autre que cela : la séparation des gens de leur propre action. Une politique dont l’axe est l’État reproduit inévitablement en son sein le même processus de séparation, en séparant les dirigeants des dirigés, en séparant l’activité politique sérieuse de l’activité personnelle frivole.

J. Holloway, Changer le monde sans prendre le pouvoir.

  

Si l’argent est le lien qui m’unit à la vie humaine, qui unit à moi la société et m’unit à la nature et à l’homme, l’argent n’est-il pas le lien de tous les liens ? Ne peut-il pas nouer et dénouer tous les liens ? N’est-il pas, de la sorte, l’instrument de division universel ? Vrai moyen d’union, vraie force chimique de la société, il est aussi la vraie monnaie « divisionnaire[…] . 

K. Marx, Ébauche d’une critique de l’économie politique (1844).

  

Le tout a beau montrer avec évidence qu’il est irrationnel, qu’un changement est nécessaire, cela ne suffit pas pour provoquer un changement ; il ne suffit pas de comprendre que le changement est nécessaire pour rendre possible une évolution différente.

MARCUSE (Herbert), L’homme unidimensionnel, p. 277.

  

Sur l’océan, lorsque souffle le vent, se lève les vagues, chacune de ces vagues pourraient dire : « vous avez vu quelle belle vague je suis ! ». Pourtant la vague n’est qu’une partie de la mer qui se soulève. Il n’y a pas de différence réelle entre la vague et l’océan. Et même si une parcelle d’eau est arrachée par le vent de l’océan. Elle peut avoir l’illusion d’exister toute seule. Mais elle tombera bien vite dans l’océan et retrouvera le tout. 

Métaphore hindouiste reprise par Joseph-Marie Verlinde.

  

Le gouvernement civil [c.-à-d. l’Etat] en tant qu’il a pour objet la sûreté des propriétés, est, dans la réalité, institué pour défendre les riches contre les pauvres.

A. Smith. La richesse des nations.

  

S’amuser signifie être d’accord.

Theodor Adorno

  

Les fous, les marginaux, les rebelles, les anticonformistes, les dissidents… Tous ceux qui voient les choses différemment, qui ne respectent pas les règles. Vous pouvez les admirer ou les désapprouver, les glorifier ou les dénigrer. Mais vous ne pouvez pas les ignorer. Car ils changent les choses. Ils inventent, ils imaginent, ils explorent. Ils créent, ils inspirent. Ils font avancer l’humanité. Là où certains ne voient que folie, nous voyons du génie. Car seuls ceux qui sont assez fous pour penser qu’ils peuvent changer le monde y parviennent.

Jack Kerouac

  

La métamorphose ou la mort ? Maintenant il faut choisir.

S. Hessel & E. Morin

  

Tout le monde parle de paix mais personne n’éduque à la paix. On éduque pour la compétition, et la compétition marque le début de toutes les guerres. Quand on éduquera pour la coopération et pour nous offrir les uns les autres de la solidarité, ce jour-là alors on éduquera à la paix.  
M. Montesori.

  

La folie, c’est de faire toujours la même chose et de s’attendre à un résultat différent.

A. Einstein

 

Ainsi, avoir la liberté économique devrait signifier être libéré de l’économie, de la contrainte exercée par les forces et les rapports économiques, être libéré de la lutte quotidienne pour l’existence, ne plus être obligé de gagner sa vie. Avoir la liberté politique devrait signifier pour les individus qu’ils sont libérés de la politique sur laquelle ils n’ont pas de contrôle effectif. Avoir la liberté intellectuelle devrait signifier qu’on a restauré la pensée individuelle, actuellement noyée dans les communications de masse, victime de l’endoctrinement, signifier qu’il n’y a plus de faiseurs d’ « opinion publique » et plus d’opinion publique. Si ces propositions ont un ton irréaliste, ce n’est pas parce qu’elles sont utopiques, c’est que les forces qui s’opposent à leur réalisation sont puissantes.

H. Marcuse, L’homme unidimensionnel

Dieu n’a pas d’autres mains que les nôtres.

Georges Bernanos, Le scandale de la vérité

Aujourd’hui, on ne peut plus dire qu’on ne savait pas. Quelqu’un qui est mal informé, c’est quelqu’un qui s’en fout. 

Citation tirée de X

L’âge d’or du genre humain n’est point derrière nous, il est au-devant, il est dans la perfection de l’ordre social ; nos pères ne l’ont point vu, nos enfants y arriveront un jour : c’est à nous de leur en frayer la route.

Saint-Simon, De la réorganisation de la société européenne, 1814.

Saint-Simon, De la réorganisation de la société européenne, 1814.

La dictature parfaite serait une dictature qui aurait les apparences de la démocratie, une prison sans murs dont les prisonniers ne songeraient pas à s’évader. Un système d’esclavage où, grâce à la consommation et au divertissement, les esclaves auraient l’amour de leur servitude.

A. Huxley, Le meilleur des mondes.

Les philosophes n’ont fait qu’interpréter le monde de diverses manières; ce qui importe, c’est de le transformer. 

Karl Marx, Les Thèses sur Feuerbach

Rien n’est plus puissant qu’une idée dont l’heure est venue.

Victor Hugo

Les idées qui flottent dans l’air, qui sont écrites sur papier, imprimées ou portées par la parole, ce n’est pas cela que ces messieurs craignent. Ce qu’ils craignent, c’est l’organisation, l’action organisée, les tentatives organisées de réaliser ces idées.

Le désir d’enrichissement illimité est donc maintenant le désir d’accumulation illimitée de pouvoir d’achat et il est lui-même le résultat de cette « illusion ». Or cette illusion est heureuse : « Il est heureux que la nature nous en impose, pour ainsi dire, à cet égard ; l’illusion qu’elle nous donne excite l’industrieuse activité des hommes, et les tient dans un mouvement continuel. C’est cette illusion qui leur fait cultiver la terre de tant de manières diverses, bâtir des maisons au lieu de cabanes, fonder des villes immenses, inventer et perfectionner les sciences et les arts, qui élèvent et charment l’existence. C’est cette illusion, surtout, qui a entièrement changé la face du globe.

Daniel Diatkine in Adam Smith, Richesse des nations.

Le conservatisme moderne est engagé dans un des exercices philosophiques les plus anciens qui soient : à savoir, la recherche d’une justification morale à l’égoïsme.

John K. Galbraith

 

La vérité est un pays sans chemin.

J. Krishnamurti

Un pays bien organisé est celui où le petit nombre fait travailler le grand nombre, est nourri par lui, et le gouverne.

Voltaire (Voilà la morale des Lumières !!!)

If you want truly to understand something, try to change it (Si tu veux vraiment comprendre quelque chose, essaie de le changer)

Kurt Lewin

Aussi long­temps que nous assi­mi­le­rons l’évolution de notre société à celle de l’huma­nité avan­çant vers un terme à la fois idéal et indé­fi­ni­ment futur, aussi long­temps que nous ver­rons, dans nos pro­grès scien­ti­fi­ques et tech­ni­ques, la preuve de cette évolution d’ensem­ble, nous ne par­vien­drons même pas à ima-giner un projet poli­ti­que nou­veau.

François Partant

 

[…] que certain soit prêt [à quitter le capitalisme], on le sait. Les expériences alternatives en témoignent. Mais là encore le grand nombre [ne suit pas]. Donc, [en plus de prendre en considération] la dynamique passionnelle collective d’une transition au-delà du capitalisme, il faut aussi compter avec ces affects tristes, liés aux renoncements matériels. Renoncement à la frénésie du désir acquisitif, renoncement à vivre dans un environnement d’objets qu’on a été conditionné à trouver beaux, renoncement à des conforts corporels dont nous avons fait des évidences et des normes. Qu’est-ce que le processus révolutionnaire peut mettre en face ? Quels affects joyeux, pour faire pencher la balance de son côté ? Plein sans doutes, essentiellement deux, on les connait : premièrement l’affranchissement de la servitude hiérarchique. Ça, c’est énorme. C’est le principal. Deuxièmement la réappropriation de la vie, individuelle et collective. Le soulagement de la terreur salariale, c’est-à-dire d’une terreur qui prend pour objet la vie même, en prenant en otage les conditions de sa reproduction matérielle. Ce soulagement, et la restauration d’un temps pour soi, sont sans doute parmi les joies les plus puissantes et les plus immédiates, clause importante, que les individus puissent trouver dans une forme de vie post-capitaliste.

La révolution n’est pas un pique-nique. Analyse du dégrisement (Conférence de Frédéric Lordon

Overcoming poverty is not a task of charity, it is an act of justice. Like Slavery and Apartheid, poverty is not natural. It is man-made and it can be eradicated by the actions of human being. Sometimes it falls on a generation to be great. YOU can be that great generation. Let your greatness blossom.

Nelson Mandela

A mesure que la nécessité se trouve socialement rêvée, le rêve devient nécessaire. Le spectacle est le mauvais rêve de la société moderne enchaînée, qui n’exprime finalement que son désir de dormir. Le spectacle est le gardien de ce sommeil.

G.Debord, La Société du spectacle, 1967.

Mon optimisme est basé sur la certitude que cette civilisation va s’effondrer. Mon pessimisme sur tout ce qu’elle fait pour nous entraîner dans sa chute.

Jean-François Brient, De la servitude moderne.

Dai diamanti non nasce niente, dal letame nascono i fior »…
(trad. : « Des Diamants rien ne naît, du fumier peuvent naître des fleurs »…)

Fabrizio De André, Via Del Campo

Ceux qui déplorent le cynisme qui caractérise, selon eux, les hommes et les femmes de notre temps, ne devraient pas omettre de le rapporter aux conditions économiques et sociales qui le favorisent ou l’exigent et qui le récompensent. Ainsi, la précarité agit directement sur ceux qu’elle touche (et qu’elle met en fait hors d’état de se mobiliser) et indirectement sur tous les autres, par la crainte qu’elle suscite et qu’exploitent méthodologiquement les stratégies de précarisation, comme l’introduction de la fameuse « flexibilité » – dont on aura compris qu’elle s’inspire de raisons politiques autant qu’économiques.                                                                                           

Pierre Bourdieu, Contre-feux 1.

Certes, comme le feu d’une petite étincelle grandit et se renforce toujours, et plus il trouve de bois à brûler, plus il en dévore, mais se consume et finit par s’éteindre de lui-même quand on cesse de l’alimenter, de même, plus les tyrans pillent, plus ils exigent ; plus ils ruinent et détruisent, plus on leur fournit, plus on les sert. Ils se fortifient d’autant, deviennent de plus en plus frais et dispos pour tout anéantir et tout détruire. Mais si on ne leur fournit rien, si on ne leur obéit pas, sans les combattre, sans les frapper, ils restent nus et défaits et ne sont plus rien, de même que la branche, n’ayant plus de suc ni d’aliment à sa racine, devient sèche et morte.

Etienne de La Boétie, Discours de la servitude volontaire

Au lieu que l’économie soit encastrée dans les relations sociales, ce sont les relations sociales qui sont encastrées dans le système économique.

K. Polanyi, La grande transformation, 1983.

Les idées dominantes d’une époque n’ont jamais été que les idées de la classe dominante : autrement dit, la classe qui a la puissance matérielle a en même temps la puissance spirituelle dominante. La classe qui dispose des moyens de production matérielle dispose en même temps, de ce fait, des moyens de la production intellectuelle, si bien qu’en général, elle exerce son pouvoir sur les idées de ceux à qui ces moyens font défaut. Les pensées dominantes ne sont rien d’autre que l’expression en idées des conditions matérielles dominantes, ce sont ces conditions conçues comme idées, donc l’expression des rapports sociaux qui font justement d’une seule classe la classe dominante, donc les idées de sa suprématie.

Karl Marx & Friedrich Engels, Manifeste du Parti communiste.

Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs.

Constitution des droits de l’Homme, version de 1793, art. 35

Ce qu’il y a de frappant avec la normalité, c’est qu’elle n’a rien de normal. La normalité n’est pas autre chose que la dénomination bourgeoise de la folie ordinaire. 

H. Kureishi

Vous avez besoin de moi, car je suis riche et vous êtes pauvre ; faisons donc un accord entre nous : je permettrai que vous ayez l’honneur de me servir, à condition que vous me donnerez le peu qui vous reste, pour la peine que je prendrai de vous commander.

J.-J. Rousseau, discours sur l’économie politique.

Le système bancaire moderne fabrique de l’argent à partir de rien. Ce processus est peut-être le tour de dextérité le plus étonnant qui fut jamais inventé. La banque fut conçue dans l’iniquité et est née dans le pêché. Les banquiers possèdent la Terre. Prenez la leur, mais laissez-leur le pouvoir de créer l’argent et en un tour de mains ils créeront assez d’argent pour la racheter. Otez-leur ce pouvoir, et toutes les grandes fortunes comme la mienne disparaîtront et ce serait bénéfique car nous aurions alors un monde meilleur et plus heureux. Mais si vous voulez continuer à être les esclaves des banques et à payer le prix de votre propre esclavage laissez donc les banquiers continuer à créer l’argent et à contrôler les crédits.

J. Stamp, directeur de la banque d’Angleterre (1928-1941).

Le premier qui, ayant enclos un terrain, s’avisa de dire : Ceci est à moi, et trouva des gens assez simples pour le croire, fut le vrai fondateur de la société civile. Que de crimes, que de guerres, de meurtres, que de misères et d’horreurs n’eût point épargnés au genre humain celui qui, arrachant les pieux ou comblant le fossé, eût crié à ses semblables : Gardez-vous d’écouter cet imposteur; vous êtes perdus, si vous oubliez que les fruits sont à tous, et que la terre n’est à personne.

J.J. Rousseau, Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes.

Le pari de l’allocation universelle est que l’insertion sociale ne peut se construire sur la contrainte mais sur la confiance placée dans les bénéficiaires de ce nouveau droit. Une utopie, sans doute, pour tous ceux qui n’accordent aucune confiance aux individus et pensent que seule la contrainte de « gagner son pain à la sueur de son front » est le meilleur garde-fou contre la paresse. Un pari sur l’intérêt et la nature humaine pour tous ceux qui pensent au contraire qu’un individu préférera toujours cumuler ce revenu à un autre salaire, surtout quand ce salaire correspondra à un travail qu’il aura librement choisi.

Jacques Marseille

C’est à la nouvelle génération de se donner la tâche de briser ce monde monstrueux, sinon obscène, de l’abondance de l’objet, si formidablement soutenu par les mass média et surtout la télévision, ce monde qui nous menace tous.

J.P.Meyer, dans l’introduction à La Société de Consommation de Jean Baudrillard

Le peuple ne travaille que parce que et aussi longtemps
qu’il est pauvre. […] pour se déployer, le capitalisme exige
l’existence d’excédants de population qu’il puisse louer à bas
prix sur le marché du travail.

M. Weber. L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme.

Il ne reste q’une seule idéologie, celle qui consiste à reconnaitre ce qui est. C’est la forme de comportement qui se soumet au pouvoir écrasant de la réalité établie.

T. Adorno, Idéologie.

L’hédonisme, l’idée de plaisir comme mode de vie est devenue la justification culturelle, sinon morale du capitalisme. Et la mentalité libérale […] prend pour idéal culturel le mouvement moderniste dont la ligne idéologique conduit à la recherche de l’impulsion comme mode de conduite. C’est cela la contradiction culturelle du capitalisme. Et c’est cela qui a conduit à la double servitude du capitalisme.

Daniel Bell, Les Contradictions culturelles du capitalisme

De cette égalité de nature procède, chez chacun, l’espoir d’acquérir les choses qu’il désire. Et donc, chaque fois que deux hommes désirent la même chose dont ils ne peuvent pas jouir tous les deux, ils deviennent ennemis l’un de l’autre […] C’est pourquoi, s’il n’existe rien de plus que la force d’un seul homme pour détourner celui qui songe à attaquer son voisin, on peut s’attendre, chaque fois que quelqu’un occupera un terrain présentant quelques avantages, qu’il l’aura ensemencé, qu’il y aura planté et bâti, à ce que d’autres, pourvus de forces unies, s’en viennent lui enlever, non seulement tout le fruit de son travail, mais même la vie ou la liberté (avant de subir à leur tour le même sort de la part d’un parti plus fort). Au sein d’une si grande crainte mutuelle entre les hommes, il n’existe pas pour qui que ce soit de meilleur moyen de se protéger que de prendre les devants […] C’est pourquoi l’acquisition de la domination par la force doit être permise à chacun, en tant que nécessaire à sa propre conservation. […] Il est donc manifeste qu’aussi longtemps qu’il n’existe aucune puissance coercitive, la condition des hommes est celle que j’ai appelée une guerre de chacun contre chacun.

Hobbes (Thomas), Léviathan, Paris, Vrin & Dalloz, 2004, dir. Y.C. Zarka, trad. F. Tricaud & M. Pécharman, ch.XIII, pp.106-107.

Quand le pillage devient un moyen d’existence pour un groupe d’homme qui vit au sein de la société, ce groupe finit par créer pour lui-même tout un système juridique qui autorise le pillage et un code moral qui le glorifie.

F. Bastiat (cf. Argent dette 2)

Toute l’économie mondiale dépend du consommateur ; s’il cesse de dépenser de l’argent qu’il n’a pas sur des choses dont il n’a pas besoin – nous courons à notre perte.

B. Bonner (cf. Argent dette 2)

Le pouvoir produit ; il produit du réel; il produit des domaines d’objet et des rituels de vérité. L’individu et la connaissance que l’on peut en prendre relèvent de cette production… la belle totalité de l’individu n’est pas amputée, réprimée, altérée par notre ordre social, mais l’individu y est soigneusement fabriqué, selon toute une tactique des forces et des corps… nous sommes ni sur les gradins ni sur la scène, mais dans la machine panoptique, investis par ses effets de pouvoir que nous reconduisons nous-mêmes puisque nous en sommes les rouages. 

M. Foucault, Surveiller et punir.

(…)La tâche la plus urgente me paraît être de trouver les moyens matériels, économiques, et surtout organisationnels, d’inciter tous les chercheurs compétents à unir leurs efforts à ceux des responsables militants pour discuter et élaborer collectivement un ensemble d’analyses et de propositions de progrès qui, aujourd’hui, n’existent qu’à l’état virtuel de pensées privées et isolées ou dans des publications marginales, des rapports confidentiels ou des revues ésotériques. […] Seule l’assemblée idéale de tous ceux, chercheurs ou militants, qui ont quelque chose à apporter à l’entreprise commune, pourra construire le formidable édifice collectif digne, pour une fois, du concept galvaudé de projet de société.

P. Bourdieu, Contre-feux 2, 2000.

 

Poser l’égalité comme un but à atteindre à partir de l’inégalité, c’est instituer une distance que l’opération même de sa « réduction » reproduit indéfiniment. Qui part de l’inégalité est sûr de la retrouver à l’arrivée. Il faut partir de l’égalité, partir de ce minimum d’égalité sans lequel aucun savoir ne se transmet, aucun commandement, ne s’exécute, et travailler à l’élargir indéfiniment. La connaissance des raisons de domination est sans pouvoir pour subvertir la domination ; il faut toujours avoir déjà commencé à la subvertir ; il faut avoir commencé par la décision de l’ignorer, de ne pas lui faire droit. L’égalité est une présupposition, un axiome de départ, ou est n’est rien.

J. Rancière, Le philosophe et ses pauvres, Paris, Flammarion, coll. « Champs essais » p.11 de la préface .

Comme acteurs séparés de notre propre faire, nous reproduisons notre propre subordination. Comme travailleurs, nous produisons le capital qui nous domine. Comme enseignants universitaires, nous jouons un rôle actif dans la perception de la société comme identité, dans la transformation du faire en être. Quand nous définissons, classifions, quantifions, quand nous affirmons que l’objet des sciences sociales est de saisir la société telle qu’elle est ou quand, encore, nous prétendons étudier la société objectivement – comme s’il s’agissait d’un objet qui nous serait extérieur – nous participons activement à la négation du faire, à la séparation du sujet de l’objet, au divorce entre acteur et produit.

J. Holloway, Changer le monde sans prendre le pouvoir.

Ne pas combattre le mal, c’est être complice du mal.

M. Luther King

Le néolibéralisme a surtout pour effet de constituer des subjectivités compatibles avec son ontologie : il produit des « entrepreneurs de soi ». Par ses mesures politiques, mais aussi par son influence culturelle, il construit des individualités obsédées par l’accumulation de capital humain, symbolique et culturel dans le but de gravir les échelons du statut social. Il n’y a plus aucun besoin de se comprendre (ni soi-même ni les autres), il est simplement temps d’exprimer les désirs que nous avons naturellement en nous.

S. Tremblay-Pepin, article internet Comprendre le néolibéralisme.

Tous les membres des sociétés capitalistes adoptent, du fait de leur socialisation, le système de comportement réifiant (propre à leur contexte socioéconomicopolitique)

A. Honneth, La réification, p.28

L’ignorant n’est pas celui qui manque d’érudition mais celui qui ne se connaît pas lui-même.

J. Krishnamurti

Et sans doute notre temps… préfère l’image à la chose, la copie à l’original, la représentation à la réalité, l’apparence à l’être. Ce qui est sacré pour lui, ce n’est que l’illusion, mais ce qui est profane, c’est la vérité. Mieux, le sacré grandit à ses yeux à mesure que décroît la vérité et que l’illusion croît, si bien que le comble de l’illusion est aussi pour lui le comble du sacré.

Feuerbach, préface à la deuxième édition de l’Essence du christianisme, 1841

L’Utopie ne signifie pas l’irréalisable, mais l’irréalisé.

Théodore Monod

Si nous sommes riches et ne nous intéressons qu’à nous-mêmes, que peuvent penser ceux qui vivent si mal ? Ne les poussons-nous pas peu à peu à la haine et à la violence?

Méditations du Dalaï-Lama

Que chacun publie quel serait le genre de gouvernement qu’il respecterait et nous aurions déjà fait un pas vers sa réalisation.

H.D. Thoreau, La Désobéissance civile.

Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait.

M. Twain

Un moine s’interroge : l’univers est-il éternel? L’univers est-il limité? Le Bouddha existe-t-il après la mort? Bouddha lui répond: tes questions sont inutiles. Celui qui cherche à y répondre est comparable à un homme blessé à mort par une flèche empoisonnée qui refuserait qu’on lui retire la flèche tant qu’il ne saurait pas à quelle caste appartient le tireur, son identité, comment était l’arc lui-même, de quel bois est-il fait, etc. L’homme mourrait avant même de connaître toutes les réponses. De même, répondre à ces questions n’a aucune incidence sur la délivrance elle-même.

Cûlamâlunkya sutta

Le puritain voulait être un homme de la profession-vocation ; nous sommes contraints de l’être. En effet, en passant des cellules monacales dans la vie professionnelle et en commençant à dominer la moralité intramondaine, l’ascèse a contribué[, pour sa part,] à édifier le puissant cosmos de l’ordre économique moderne qui, lié aux conditions techniques et économiques de la production mécanique et machiniste, détermine aujourd’hui, avec une force contraignante irrésistible, le style de vie de tous les individus qui naissent au sein de cette machinerie — et pas seulement de ceux qui gagnent leur vie en exerçant directement une activité économique. Peut-être le déterminera-t-il, jusqu’à ce que le dernier quintal de carburant fossile soit consumé. Aux yeux de Baxter, le souci des biens extérieurs ne devait peser sur les épaules de ses saints que comme « un manteau léger que l’on pourrait rejeter à tout instant ». Mais la fatalité a fait que ce manteau est devenu un habitacle dur comme l’acier (stahlhartes Gehäuse). Tandis que l’ascèse entreprenait de transformer le monde et d’y être agissante, les biens extérieurs de ce monde acquéraient sur les hommes une puissance croissante et finalement inexorable, comme jamais auparavant dans l’histoire. Aujourd’hui, l’esprit de cette ascèse s’est échappé de cette carapace — définitivement ? Le sait-on ? Dans tous les cas, depuis qu’il repose sur une base mécanique, le capitalisme vainqueur n’a plus besoin de cet étai.

M. Weber, La Richesse des nation

Avec la Phénoménologie, il s’agit de prendre conscience que ce que nous croyons percevoir n’est que phénomène, c’est-à-dire produit par notre intentionnalité. Il est impossible de connaître le monde en soi, la réalité. Ce que nous croyons être « la » réalité est toujours « notre » réalité. L’ordre et le désordre que nous rencontrons dans les situations et au-delà dans notre vie se révèlent être des conséquences de notre approche, voire être implicite ou un aspect de notre approche. Pas de l’approche des autres : nous ne vivons pas dans leur monde. Nous devons accepter cette solitude existentielle.

http://www.pyrenees-pireneos.org/phenomenologie_analyse_existentielle.htm

Sous un gouvernement qui emprisonne un seul être injustement, la juste place du juste est aussi la prison.

H.D. Thoreau, La Désobéissance civile.

Laissez moi décider et contrôler la régulation de la masse monétaire d’une nation, et je me fiche de ce qui fait les lois.

Mayer Amschel Rothschild, fondateur de la dynastie de banquiers du même nom.(1744 – 1812).

Sur le Titanic en train de sombrer, est-il raisonnable de consacrer beaucoup d’efforts et d’intelligence à obtenir une meilleure cabine ?

Albert Jacquard

De nos jours, le possible et l’impossible se répartissent étrangement, chacun se dilatant simultanément à l’excès. D’un côté, celui des libertés personnelles ou de la technologie et des sciences, l’impossible devient toujours plus possible – c’est en tout cas ce que l’on nous affirme : “rien n’est impossible”, le sexe nous est accessible jusque dans ses plus extrêmes perversions, nous pouvons télécharger des répertoires entiers de musique, de films et de séries télévisées, n’importe qui peut prétendre (avec un peu d’argent…) à voyager dans l’espace, la recherche s’oriente vers un accroissement de nos capacités physiques et intellectuelles, voire vers une manipulation de nos caractéristiques fondamentales via des interventions sur le génome humain, jusqu’au rêve techo-gnostique de l’immortalité atteignable grâce à la transformation de notre identité en un logiciel que l’on pourrait télécharger d’une machine à l’autre… De l’autre côté, et en particulier dans le domaine des relations socio-économiques, notre époque se perçoit comme celle de la maturité où l’humanité, avec la chute des États communistes, a renoncé à ses rêves utopiques et millénaires pour accepter les contraintes de la réalité (comprendre : de la réalité socio-économique capitaliste) et son lot d’impossibilités : il est impossible… d’entreprendre des actions collectives à grande échelle (qui aboutissent nécessairement à la terreur totalitaire), de se raccrocher désespérément au vieux système de l’État-Providence (cela diminue la compétitivité et mène à la crise économique), de se tenir à l’écart du marché mondial, et ainsi de suite.

S. Zizek :  « L’Idée du communisme comme universel concret », In L’idée du communisme vol 2.

L’homme démocratique ne vit qu’au pur présent, ne faisant loi que du désir qui passe. Aujourd’hui il fait une grasse bonne bouffe arrosée, demain il n’en a que pour Bouddha, le jeûne ascétique, l’eau claire et le développement durable. Lundi, il va se remettre en forme en pédalant des heures sur un immobile vélo, mardi il dort toute la journée, puis fume et ripaille. Mercredi, il déclare qu’il va lire de la philosophie, mais finit par préférer ne rien faire. Jeudi, il s’enflamme au déjeuner pour la politique, bondit de fureur contre l’opinion de son voisin et dénonce avec le même enthousiasme furieux la société de consommation et la société du spectacle. Le soir, il va voir au cinéma un gros navet médiéval et guerrier. Il revient se coucher en rêvant qu’il s’engage dans la libération armée des peuples asservis. Le lendemain, il part au travail avec la gueule de bois, et tente vainement de séduire la secrétaire du bureau voisin. C’est juré, il va se lancer dans les affaires ! A lui les profits immobiliers ! Mais c’est le week-end, c’est la crise, on verra tout ça la semaine prochaine. Voilà une vie, en tout cas ! Ni ordre, ni idée, mais on peut la dire agréable, heureuse, et surtout aussi libre qu’insignifiante. Payer la liberté au prix de l’insignifiance, cela n’est pas cher.

A.Badiou, La Démocratie dans quel état ?

Des millions de gens ont vu tomber une pomme, Newton est le seul qui se soit demandé pourquoi.

Bernard Baruch

Si le décollage économique de l’Occident a commencé avec les procédés qui ont permis l’accumulation du capital, on peut dire, peut être, que les méthodes pour gérer l’accumulation des hommes ont permis un décollage politique par rapport à des formes de pouvoir traditionnelles, rituelles, coûteuses, violentes, et qui bientôt tombées en désuétude, ont été relayées par toute une technologie fine et ajustée de l’assujettissement. De fait les deux processus, accumulation des hommes et accumulation du capital, ne peuvent pas être séparés ; il n’aurait pas été possible de résoudre le problème de l’accumulation des hommes sans la croissance d’un appareil de production capable à la fois de les entretenir et de les utiliser ; inversement les techniques qui rendent utiles la multiplicité cumulative des hommes accélèrent le mouvement d’accumulation du capital.

M. Foucault, Surveiller et punir 

On ne peut pas résoudre un problème avec les modes de pensée qui l’ont engendré.

A. Einstein

Cette disposition à admirer, et presque à vénérer, les riches et les puissants, ainsi qu’à … négliger les personnes pauvres et d’humble condition … est la cause la plus grande et la plus universelle de la corruption de nos sentiments moraux.

A. Smith, Théorie des sentiments moraux.

Sitôt que le service public cesse d’être la principale affaire des citoyens, et qu’ils aiment mieux servir de leur bourse que de leur personne, l’État est déjà près de sa ruine. Faut-il marcher au combat ? ils payent des troupes et restent chez eux ; faut-il aller au conseil ? ils nomment des députés et restent chez eux. À force de paresse et d’argent, ils ont enfin des soldats pour asservir la patrie et des représentants pour la vendre. 

J.-J. Rousseau, Du contrat social.

Ils appartiennent à notre vocabulaire de tous les jours. On dit : c’est possible, lorsqu’un événement ne se heurte, dans l’horizon qui est ouvert, à aucun empêchement catégorique. C’est possible : la logique ne l’interdit pas, la science ni la coutume n’élèvent d’objection. Possible, alors, est un cadre vide : c’est ce qui n’est pas en désaccord avec le réel, ou bien ce qui n’est pas encore réel, ni du reste nécessaire. Mais nous sommes éveillés depuis longtemps à un autre sens. LA possibilité, ce n’est pas ce qui est seulement possible et devrait être regardé comme moins que réel. La possibilité, en ce nouveau sens, est plus que réalité : c’est être, plus le pouvoir de l’être. La possibilité établit la réalité et la fonde : on est ce qu’on est, seulement si on a le pouvoir de l’être. […] Le mot possible s’éclaire donc, lorsqu’on le met en rapport avec le mot pouvoir, puis le mot puissance (je simplifie beaucoup). Dans quelle mesure la puissance est-elle une altération, est-elle une définition de la possibilité ? Avec celle-ci, du moins, commence la puissance, se détermine l’appropriation qui s’accomplit en possession.

Maurice Blanchot, L’entretien infini

Si vraiment l’existence précède l’essence (…) il n’est pas un de nos actes qui, en créant l’homme que nous voulons être, ne crée en même temps une image de l’homme tel que nous estimons qu’il doit être. 

J.P.Sartre, L’existentialisme est un humanisme

L’homme est la nature prenant conscience d’elle-même.

Élisée Reclus, l’Homme et la Terre (1905)

L’inégalité a un effet corrosif, disait-il. Elle pourrit les sociétés de l’intérieur… Elle illustre et amplifie la perte de cohésion sociale… c’est la pathologie de notre époque et la plus grande menace pour la santé de toute démocratie.

Tony Judt.

Si la sagesse est l’art de répondre à toutes les questions qu’on peut poser au sujet de l’existence humaine, la philosophie est l’art de les poser; le philosophe est l’homme qui finit toujours par se poser une question à laquelle il ne peut plus répondre (et à laquelle il ne répond, lors qu’il veut à tout prix y répondre, qu’en cessant d’être philosophe, sans pour cela devenir un sage: c’est à dire en répondant soit par quelque chose qui est en contradiction avec le reste de son discour, soit par un appelle à un « in-conscient » « in-compréensible » et ineffable)…Si le sage est l’homme satisfait par ce qu’il est, c’est à dire par ce dont il prend conscience en lui, le philosophe prend conscience de son état de non-satisfaction; le philosophe est essentiellement un mécontent (ce qui ne signifie pas nécessairement: un malheureux). En fait, le philosophe est mécontent parce qu’il ne sait pas ce qu’il veut.

A. Kojève, Introduction à la lecture de Hegel.

De la réalité chacun se fait une idée. Dans les discours scientifique et politique, dans les conversations de tous les jours, nous renvoyons en dernière instance au référent suprême : le réel. Mais où est donc ce réel ? Et surtout, existe-t-il réellement ? De toutes les illusions, la plus périlleuse consiste à penser qu’il n’existe qu’une seule réalité. En fait, ce qui existe, ce sont différentes versions de la réalité, dont certaines peuvent être contradictoires, et qui sont toutes l’effet de la communication et non le reflet de vérités objectives et éternelles.

Paul Watzlawick, La réalité de la réalité, Seuil, Paris, 1976

Pour Freud comme pour Marx, mais plus explicitement, l’homme est fondamentalement et dialectiquement bon-mauvais. Fondamentalement car l’homme est le sujet d’un conflit radical, et ce conflit est le foyer des progressions comme des régressions, mieux, d’un perpétuel mouvement progressif-régressif. Dialectiquement, le bon peut naître du mauvais, le mauvais du bon. La nature du bon-mauvais est instable, car le moi est instable, formé génétiquement et travaillé constamment, non seulement par l’antagonisme d’Eros et Thanatos, mais aussi par la lutte permanente entre la pulsion et la répression, le Ça et le Surmoi. Les dérivations sublimées des conflits (l’art, la culture, la civilisation) sont en principe « bonnes » mais comportent leur poison et leur insuffisance ; les régressions névrotiques et psychotiques sont en principe « mauvaises ». mais les mécanismes qui se bloquent dans la névrose ne sont-ils pas ceux qui entretiennent la santé de la vie normale ? Le plus remarquable, dans l’axe de l’anthropologie freudienne, est que l’homme (mauvais-bon) est constitutionnellement névrosé-sain. L’homme vit une situation névrotique permanente qui est la condition de sa santé. Dès l’origine, la conscience de la mort lui est un traumatisme qui le suit toute sa vie, et cristallise la religion comme « névrose obsessionnelle de l’humanité » : dès l’origine, le rapport avec le monde et avec autrui l’amène à doubler son rapport pratique (l’outil, le travail) d’un rapport magique (le rite, le fétiche, la possession), dès l’origine, la répression fondamentale – le tabou – qui établit la règle sociale, le stabilise et le détraque à la fois et refoule une part torrentueuse de lui-même dans l’imaginaire. Ainsi l’homme social est inadapté à son sort biologique d’être mortel ; l’homme biologique est inadapté à son sort social d’être réprimé. Cette double inadaptation projette l’homme dans les délires, mais en même temps le catapulte dans le devenir.

Edgar Morin, Introduction à une politique de l’homme, Paris, Seuil, 1965, pp. 23-24.

Être radical, c’est prendre les choses par la racine. Or, pour l’homme, la racine, c’est l’homme lui-même.

K. Marx, Contribution à la critique de la philosophie du droit de Hegel.

 

 

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